Deuxième série

 

Deuxième série

 

Au sâdhak chargé du Service des Bâtiments entre 1930 et le début des années 1940.

 

Le péché appartient au monde et non au yoga.

 

 

Par sa manière de penser, de sentir et d'agir, chacun émet des vibrations qui constituent son atmosphère personnelle et attirent tout naturellement des vibrations de même nature et de même qualité.

 

 

Tant que vous êtes capable de frapper quelqu'un, vous vous exposez à être traité de la même façon.

 

 

Vous attendez de ceux qui travaillent avec vous qu'ils soient des génies. C'est un peu trop demander.

 

 

J'ai reçu votre note concernant le savon pour la lessive. Le dernier savon vous a été remis le 22 mars, il y a seulement seize jours, alors qu'un savon doit durer trente jours. C'est évidemment votre coolie qui te vole, et je n'ai nullement l'intention de l'approvisionner en savon de lessive. Il faut trouver un moyen de l'en empêcher ; lui en parler ne servirait à rien. (Vous aurez le savon demandé; j'ai donné mon accord, pour cette fois-ci.)

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X a entamé un nouveau registre, mais il me semble qu'il n'avait pas terminé le précédent.

Je ne vois pas du tout pourquoi il faudrait changer de registre tous les mois. Voulez-vous vérifier si le précédent est ou non terminé et agir en conséquence.

À l'avenir je serai obligée de demander à voir. le registre terminé avant d'en accorder un nouveau. C'est-à-dire qu'à chaque changement de registre, le registre terminé devra m'être envoyé en même temps que la note m'en demandant un nouveau.

Je ne vois pas la nécessité de laisser une page blanche au début.

 

 

Y se plaint que la poussière du ciment tombe dans la nourriture du bétail quand elle est préparée dans la véranda.

Peut-être est-ce cela qui rend les bœufs malades. Une de

Il faudrait voir si on ne pourrait pas faire quelque meilleur arrangement.

 

 

(Au sujet de l'agrandissement d'une salle de bain.)

 

Elle me paraît bien assez grande. Us n'ont pas l'intention d'en faire une salle de bal, que Je sache.

 

 

Comment se fait-il que depuis deux jours vous ne me parlez pas die la table de pétrissage de la boulangerie ? Si elle n'est pas de suite réparée, nous n'aurons plus de pain à manger. Il faut que ce travail soit fait immédiatement.

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La salle à manger m'inquiète, Il ne suffit pas de dire : "Rien ne peut arriver" pour éviter un accident. Votre formation mentale a beau être forte, la formation contraire est au moins aussi forte que la vôtre, et nous ne devons jamais tenter les forces adverses.

Je vous demande de laisser là votre entêtement et d'être parfaitement sincère. Allez voir, sans aucune idée préconçue.

Allez-y et regardez honnêtement, soigneusement, par- tout ; n'oubliez pas qu'une trentaine de personnes prennent là leurs repas et: que ce serait horrible si quelque chose arrivait ; prenez conscience de votre responsabilité et venez me voir demain matin pour me donner une réponse définitive. Je me fierai à ce que vous me direz.

P.S, Naturellement, je ne vous demande pas d'y aller dès ce soir, mais seulement demain matin.

Le 14 décembre 1931

 

(À l'atelier des bicyclettes, un banc de bois s'est cassé, entraînant un maçon juché sur une planche posée sur ce banc. Le maçon est indemne. Cet incident s rappelé à Z que l'après-midi du jeudi, entre 13h 30 et 15h 30, est "Râhoukâl"¹.)

 

Il vaut toujours mieux NE PAS se rappeler ces superstitions. C'est la suggestion qui agit dans ces cas-là — le plus souvent une suggestion logée dans le mental subconscient; mais elle se renforce en devenant consciente.

Le 9 juin 1932

 

On a trouvé quatre chauves-souris mortes sous le toit, à l'extrémité nord de la poutre ouest. Deux d'entre elles avaient été aspergées de solignum².

 

¹Période néfaste de fa journée, selon une croyance locale.

²Produit destiné à protéger le bois contre les termites.

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Quel dommage ! Les chauves-souris mangent les termites !

Le 14 juin 1932

 

Pendant qu'on pulvérisait du solignum, le maçon en a reçu des éclaboussures dans les yeux.

 

Il faut prendre des précautions, beaucoup de précautions pour que cela ne se produise jamais. Vous rendez-vous compte de notre responsabilité et de CE QUE CELA SIGNIFIE s'il arrive quelque chose de grave ?

Le manque de précaution appartient au même mouvement que la hâte et l'impatience.

 

J'ai remarqué que même lorsque la Mère sait de quoi nous avons besoin. Elle attend que nous le demandions pour l'accorder.

 

Ce n'est pas exact dans tous les cas, et surtout pas pour tout le monde.

 

D'après mon expérience personnelle, j'explique cela de la façon suivante : je sens une réticence lorsque je demande quelque chose à la Mère. Mais en fait il ne devrait y avoir aucune réticence dans nos relations avec la Mère; Sous nos mouvements devraient être pleins de joie, y compris l'action de demander. Comme ce n'est pas le cas, la Mère nous apprend à demander joyeusement.

 

Ce n'est pas tout à fait cela. Il y a sans doute, dans chaque cas, une raison particulière. Ce qui est constant, c'est que l'urgence des besoins et l'importance accordée à leur satisfaction sont chaque fois évaluées d'une manière différente. J'attache aussi une certaine valeur à la capacité d'imagination, d'adaptation, d'utilisation ou d'invention qui se développe lorsqu'on est dans l'obligation de résoudre un problème matériel.

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Si la personne est réticente pour formuler su de- mande, c'est parce qu'elle est pleine de désirs. Si elle formule toutes ses exigences — qu'elle prend pour des besoins — elle sera déçue. Elle préfère ne pas en parler plutôt que d'être déçue.

 

Oui, tant qu'il y a des désirs, aucune intimité véritable ne peut s'établir.

Le 15 juin 1932

 

(Au sujet d'une peinture appelée "gris entretien".) Un tabouret utilisé par la Mère a été peint au "gris entretien". J'avais pourtant informé le magasin que cette peinture devait être réservée à la chambre de Sri Aurobindo.

 

Mais qui a laissé sortir cette peinture ? N'avait-on pas informé les responsables que le "gris entretien" ne devait servir qu'à repeindre les portes et les fenêtres de la chambre de Sri Aurobindo ? (!)

Pourquoi mon tabouret a-t-il été peint au gris entretien ? Autant que je me souvienne, je n'ai pas demandé que l'on utilise cette peinture.

 

En l'occurence, on a laissé sortir la peinture parce qu'elle avait été demandée pour repeindre le tabouret de la Mère.

 

Une règle est une règle et je ne vois pas pourquoi mon tabouret a échappé à la règle sans un mot signé de ma main.

 

"Se tourner vers Toi, s'unir à Toi, vivre en Toi et pour Toi, c'est le bonheur suprême, la joie sans mélange,

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la paix immuable. (...) Pourquoi les hommes fuient-ils ces bienfaits comme s'ils en avaient peur¹?"

 

Je me le demande toujours et ne puis trouver aucune réponse excepté que la stupidité règne sur le monde !

Le 25 juin 1932

 

Depuis quelques jours je revois en pensée des scènes et des incidents qui appartiennent à un passé lointain.  Mon mental se réjouit de constater la différence entre ce que je suis maintenant et ce que j'étais alors.

 

Il est parfois bon de regarder en arrière pour s'assurer du progrès accompli, mais seulement à condition que ce soit un levier qui encourage à faire des efforts en vue du progrès qui reste à faire.

Le 27 juin 1932

 

Sur la couverture d'un registre utilisé par X, il y avait une table des Râhoukâl, donnant les heures néfastes pour chaque jour du mois. j'ai collé un papier blanc par-dessus.

J'implore de Toi la grâce d'une parole qui frappe cette superstition à la racine.

 

Croyez-vous qu'il soit si facile de déraciner une stupidité ? Les stupidités sont toujours profondément enracinées dans le subconscient.

Le 1er juillet 1932

 

"À chaque minute tout l'imprévu, l'inattendu, l'inconnu est devant nous.²" Le remède?

 

¹Extrait des Prières et Méditations de la Mère. éd. 1980. p. 24,

²Ibid.. p. 58.

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Être plastique et vigilant, attentif et alerte — réceptif.

Le 18 juillet 1932

 

À propos, j'ai vu le peintre passer la table du salon au papier de verre, et j'ai été horrifiée ! Il frottait violemment dans tous les sens, d'une main, puis de l'autre, en regardant tout sauf ce qu'il faisait, pauvre table, quel traitement! Ce qui sortira de tant d'inconscience et de manque de soin, je préfère ne pas y penser.

Le 20 juillet 1932

 

"Une seule goutte de ton divin amour peut transformer celle souffrance en un océan de joie !

Oh!  que toutes les larmes soient séchées, toutes les souffrances soulagées, ton/es les angoisses dissipées, et que la calme sérénité habite les cœurs.

Je suis triste, prends pitié de moi.

Ô Toi qui soulages toutes les souffrances et: dissipes toutes les ignorances. Toi le guérisseur suprême, prends pitié de moi.

Brise cette résistance qui me remplit d'angoisse. Pourquoi, pourquoi cette nuit¹?"

 

Des explications, je pourrais en donner beaucoup ; le comment et le pourquoi peuvent facilement être décrits — mais est-ce bien nécessaire ? Ce n'est pas cela qui guérit. La guérison ne vient pas de la tête mais du cœur.

Comprendre est bien, mais vouloir est mieux.

L'amour propre est le grand obstacle.

L'amour divin est le grand remède.

Le 20 juillet 1932

 

Je pleure sans savoir pourquoi.

 

¹La prière du sâdhak se compose d'extraits de plusieurs Prières de la Mère: premier paragraphe, p. 41 ; deuxième, p. 53 ; quatrième. p. 100 ; cinquième, pp. 131 et 140

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Pleure si tu veux, mais ne te fais pas de souri. Le soleil est plus brillant après l'averse.

 

Je me retourne dans mon lit en cherchant le sommeil.

 

Paix, paix, enfant, ne te tourmente pas...

 

Mais quelle était cette obscurité ? Pendant ces quatre dernières heures, je ne me reconnaissais plus. Je me raidissais, j'étais brûlant, tout était sombre.

 

Exactement les symptômes d'une attaque des forces adverses.

 

J'imaginais que la Mère jetterait ce. cahier avec dégoût, ou que Sri Aurobindo écrirait deux pages pour me demander de quitter l'Ashram, nu du moins de cesser de travailler dès demain. Mère dira • "C'est parce qu'il s'est trop laissé aller ce matin ! Il mérite qu'on le jette dehors." Et ainsi de suite.

 

L'absurdité habituelle.

À propos, je trouve que les Forces hostiles n'ont pas beau- coup d'imagination ; elles ressortent toujours les mêmes tours ! Ils ne devraient plus marcher, depuis le temps.

 

Ô Douce, Douce Mère, Ta Paix est en moi. Ta Paix est en moi. Ta Paix est en moi-

 

Dors, enfant, dors, avec la Douce Mère dans ton cœur !

Réveille-toi, enfant, réveille-toi, avec la Douce Mère dans ton cœur !

Le 21 juillet 1932

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"Amour, Amour Divin, dans un silence fécond je Te salue.¹"...

 

Je m'ouvre à toi et je veux t'obéir avec une absolue fidélité.

Le 28 juillet 1932

 

C'est dans la bienveillance que réside la vraie grandeur, la vraie supériorité.

J'espère que X n'est pas véritablement contrariant. Je n'aimerais pas cela du tout. Chacun a ses défauts et ne doit jamais l'oublier dans ses relations avec les autres.

Le 29 juillet 1932

 

Il est toujours préférable de ne pas trop montrer aux autres ce que j'écris, car je ne traite pas tout le inonde de la même manière et ce que je dis à l'un, je ne le dirais peut-être

Méfie-roi de toutes les décisions individuelles (elles peuvent être arbitraires).

Le 30 juillet 1932

 

"À Toi toute la ferveur de mon adoration². "

 

C'est une adoration qui se traduit en travail — elle n'en a que plus de valeur.

Le 31 juillet 1932

 

J'ai soif de Ta conscience, ô Douce Mère, je me fonds en Toi.

 

Cette soif sera étanchée quand ceci (ô Douce Mère, je me fonds en Toi) sera psychologiquement réalisé.

Le 2 août 1932

 

¹Prières et Méditations : début de ta phrase, p. 31 ; fin de la phrase, p. 33.

²Ibid. p. 65-

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Ce soir, quand Y m'a informé que Z était malade, j'ai aussitôt dit qu'elle avait dû se révolter contre la Mère. Il m'a demandé si je croyais que la maladie était toujours due à une révolte ou à une mauvaise attitude. J'ai dit que oui. Il m'a demandé un exemple concret. J'ai décrit un incident où la Mère avait trouvé à redire à mon travail, ce qui avait suscité en moi une révolte sourde qui m'avait rendu malade. Il m'a montré ses doigts en disant qu'il n'avait pas conscience d'une révolte ou d'une mauvaise attitude qui serait à l'origine de ses douleurs dans les doigts.

 

La mauvaise attitude peut se trouver dans la conscience corporelle elle-même (un manque de foi ou de réceptivité) et alors elle est très difficile à détecter, car elle ne correspond à rien de taux dans la pensée ou les sentiments ; en effet, le plus souvent et chez presque tout le monde, la conscience corporelle est subconsciente.

 

Est-ce bien de parler de ses expériences, comme dans cette conversation ?

 

On ne peut pas établir de règle générale, dans chaque cas c'est différent. L'important, c'est l'attitude qui est derrière les paroles. Seules les paroles prononcées comme une offrande pure et sincère sur l'autel de la Vérité divine ont vraiment une valeur.

Le 6 août 1932

 

Il y avait de la légèreté, de la gaîté et de la joie dans Ton expression ce matin, comme pour compenser la gravité que je ressentais.

 

C'était pour que mes paroles ne puissent pas être interprétées comme un reproche ou une réprimande, ce qui n'était nullement dans mes intentions.

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J'exprimais mon amusement en observant ce qui se fait dans le monde et en constatant que ce monde ne peut que se méprendre sur ce que nous faisons, nous qui cherchons trop sincèrement à exprimer la Vérité pour être aisément compris des gens ordinaires- C'est cette recherche qui donne une impression d'hésitation, d'incertitude, de tâtonnements infructueux, etc.

Le 10 août 1932

 

"Permets que nous réalisions ta 'Victoire¹" si l'heure est venue... mais c'est à Toi de répondre, ô Douce Mère.

 

C'est avec la concentration de notre volonté et l'intensité de notre aspiration que nous pouvons hâter le jour de la victoire.

Le 13 août 1932

 

Mère Bien-Aimée,

Je ne crois en l'efficacité de la prière que lorsque celle-ci est adressée a la Mère, c'est-à-dire à la Mère qui est dans celle pièce, en chair et en os. Si l'on adresse sa prière à une divinité inconnue, inconnaissable ou invisible, j'en ris comme d'une pure philosophie.

 

Je trouve votre réponse à X excellente. Mais il est libre d'attendre davantage d'aide d'une Mère invisible et silencieuse (qui ne contredit jamais personne ouvertement) s'il le préfère.

Le 15 août 1932

 

Pourquoi fais-Je en rêve des choses que je ne ferais pas quand je suis éveillé ? Est-ce parce que la maîtrise mentale ne s'exerce pas dans l'état de rêve, et que par conséquent l'être vital est libre d'agir à son gré ?

 

¹Prières et Méditations, p. 195.

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Ce mouvement vient d'un niveau subconscient qu'on ne laisse pas s'exprimer pendant la journée.

Aucune maîtrise véritable et constante n'a encore été établie dans cette partie de l'être.

 

J'ai tenté une expérience. Ce matin, en surveillant les ouvriers, je me suis concentré en priant pour que chacun d'eux devienne conscient de travailler pour la Mère et en ressente de la joie. Après m'être concentré ainsi pendant une heure environ, Je me suis senti fatigué et imperceptiblement la concentration s'est effritée. Pourquoi cette fatigue ? Pourquoi est-il difficile de rester en concentration vingt-quatre heures sur vingt-quatre ?

 

L'être physique se fatigue toujours quand on lui demande de rester longtemps en concentration.

La concentration peut être maintenue constamment, mais la décision ne doit pas venir du mental.

Ce doit être une décision divine.

Le 16 août 1912

 

Quelle est l'activité qui emploiera le plus complètement toutes les énergies ?

 

Celle qui sera faite dans le plus parfait esprit de consécration.

Le 20 août 1932

 

Une réticence : Mère a dit ce matin qu'il faudrait un mois et demi pour terminer la salle de bain. J'ai acquiescé. En fait, je prévois qu 'elle sera finie en un mois. Deux pensées contradictoires m'ont traversé l'esprit quand j'ai dit oui : (1) Si Mère dît que cela prendra un mois et demi, ce ne peut être que vrai : il peut y avoir des retards que je suis incapable de prévoir;

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(2) mais pourquoi n'ai-je pas dit que selon mes prévisions, il y en a pour 30 jours de travail ?

 

C'est bien. Il est indispensable que vous pensiez que les travaux ne dureront que 30 jours ; autrement il y en aurait pour plus de deux mois !

Mais je préfère que ce soit bien fait plutôt que vite fait.

 

Je prie la Mère qu'il n'y ait pas de retards imprévus.

 

Je l'espère aussi — mais j'ai remarqué que les travaux prennent toujours plus longtemps que vous ne l'aviez prévu, et nous sommes repoussés de semaine en semaine. J'aime mieux compter largement et ne pas être déçue.

 

Mère, quelle est la bonne attitude? Si j'écoute la suggestion (1), j'ai l'impression d'une dissimulation; si je suis la suggestion (2), j'ai l'impression de contredire la Mère. Que dois-je faire? 

 

Vous ne me contredisez pas en exprimant ce que vous pensez. Je n'attends pas de vous des prophéties ni des idées toujours justes.

Le 25 août 1932

 

Mère,

Hier je T'ai dit : "Ils sont tous partis. " En fait, j'avais vu que le menuisier s'en allait (et non qu'il était parti) et j'avais calculé que le temps que je sorte et que je ferme la porte, il serait parti. Alors j'ai répondu "Oui, Mère, le dernier ouvrier est parti. " Mais voilà, il était là, en train de ranger les pierres ponces ! Si je m'étais retenu une seconde au lieu de me hâter de répondre, ma réponse aurait été plus précise. Cela me met un peu mal à l'aise.

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Il n'y a pas de raison d'être mal à l'aise. Les réponses spontanées de la conscience extérieure sont toujours vagues et plus ou moins inexactes. I! faut une grande vigilance pour corriger cela, et aussi une résolution très ferme. L'incident était peut-être destiné à vous faire prendre cette résolution.

Le 5 septembre 1932

 

Mère divine,

Je me sens fatigué aujourd'hui. Je ne me suis pas surmené, je ne me suis pas non plus privé de sommeil ni de repos. J'ai eu aussi de petites envies de vomir, mais maintenant elles ont cessé.

 

Cela ne m'étonne pas. Votre progrès intérieur est arrivé à un point où vous ne pouvez plus vous mettre en colère sans en sentir les effets. Vous devez une fois pour toutes prendre la résolution — et vous y tenir — de NE JAMAIS vous METTRE EN COLÈRE.

Je vous ai déjà dit que loin d'amoindrir votre autorité sur les ouvriers, cela ne peut que la renforcer.

Le 26 septembre 1912

 

Il vaut mieux être simplement sincère qu'habile.

Le 31 octobre 1932

 

Aimer le Divin c'est être aimé de Lui.

Le 2 novembre 1932

 

Nous avons voulu fermer les fenêtres à cause de l'averse et nous avons constaté — non sans malaise — qu'aucune ne ferme convenablement. A moins d'être un Hercule et un lutteur, impossible de les fermer. Elles restent fermées par pure bonne volonté, je suppose, mais cette bonne volonté ne résisterait pas à un bon coup de vent !

Il est urgent de les réparer. Demain matin je vous montrerai ce qu'il en est.

Le 9 novembre 1932

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Douce Mère,

X m'a dit ce matin : "As-tu vu le plâtre posé par Y? Comme c'est bien fait ! Noire travail n'est pas aussi beau." J'ai répondu : "Je connais au moins une raison. C'est que tu n'es pas tout le temps avec les ouvriers. Ce matin, tu étais absent entre 9h 30 et 10h 30. " X a dit ; "Mais Y aussi s'éclipse de temps en temps."

 

Je vous l'ai déjà dit : si quelqu'un refuse de travailler consciencieusement, que puis-Je faire ? Il est vrai que le travail en souffre, mais lui-même en souffre encore plus, car aucune méditation, si fréquente ou prolongée soit-elle, ne peut rem- placer la sincérité dans le service du Divin.

Le 5 décembre 1932

 

Douce Mère,

"Il faut savoir planer dans la confiance immuable, dans le vol assuré et la connaissance par- faite¹. " Je ne comprends pas cette phrase. Comment peut-on voler ? Quel est le sens figuré de ce mot ?

 

Cela veut dire simplement de s'élever au-dessus (voler dans les airs) de la conscience ordinaire, dans une conscience supérieure d'où on peut voir les choses d'en haut, ce qui permet de les voir plus profondément.

Le 9 décembre 1932

 

Si vous cherchez à cacher quelque chose au Divin, vous êtes sûr de tomber sur votre nez, plouff!! comme cela...

Le 10 décembre 1932

 

La joie réside dans la confiance absolue en le Divin.

Le 2 janvier 1933

 

¹Prières et Méditations, p. 191.

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Pourquoi, lorsque vous êtes embarrassé, vous ne de- mandez plus l'aide de la Grâce Divine ? Vous savez pourtant, par expérience, que le résultat est inévitable et merveilleux !

Le 16 janvier 1933

 

Douce Mère,

Je ne suis pas encore arrivé a estimer clairement la différence entre un désir et un besoin pour le travail. Alors, voici la méthode que je suis Quand il me semble que j'ai besoin de quelque chose (n'importe quoi), j'attends. Si l'inconvénient causé par le manque de cette chose se répète ou s'accentue, je la demande.

 

Alors le désir s'exaspère et c'est avec une sorte de rage acide que la demande est faite.

 

Quelquefois je pense suivre une méthode diamétrale- ment opposée. C'est-à-dire demander une chose aussi- tôt que je pense que j'en ai besoin, sans réfléchir, sans tarder, mais je n'ose pas adopter celte méthode.

 

I! y a encore une autre méthode, bien plus intéressante que ces deux-là. Ne rien demander du tout et voir ce qui arrivera.

 

Donne-moi un procédé infaillible.

 

Je n'en ai pas.

Le 26 mars 1933

 

Douce Mère a dit : "Il y a encore une autre méthode. " j'étais un peu embarrassé pour suivre la parole de Douce Mère à la lettre- j'ai commencé à suivre l'avis de Douce Mère. Je n'ai rien demandé, même le 1er avril¹ et c'est pourquoi aussi je suis embarrassé.  

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Je crains qu'en voulant trop suivre "à la lettre", vous ayez perdu "l'esprit". Je n'ai jamais voulu parler des choses qui sont données aux "stores", et j'étais bien étonnée quand j'ai vu le premier que vous n'aviez rien demandé. Vous ferez bien de demander les choses dont vous avez besoin strictement.

Le 5 avril 1913

 

Non, ce n'est pas parce que les gens sont mesquins qu'il faut l'être aussi.

Le 24 avril 1933

 

Douce Mère,

La vieille domestique X demande un emploi pour son jeune fils (moins de huit ans, je crois). Peut- on l'employer pour déblayer les débris à la maison Ganapati ?

 

Au-dessous de huit ans il est impossible de les faire travailler, ce serait criminel.

Le 9 juin 1933

 

Nous voulons être les fidèles ouvriers de la Grande Victoire.

Le 26 juin 1933

 

Douce Mère,

Le charpentier Y a pris dix jours de congé pour se remarier. Il demande 40 roupies d'avance, à rembourser à raison de 8 roupies par mois. Je lui ai déjà dit que Mère n 'approuve ni mariage — encore moins remariage — ni avances pour encourager les mariages.

 

¹Le premier de chaque mois, les sâdhaks recevaient (et reçoivent encore aujourd'hui) les articles de première nécessité.  

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Il insiste pour qu'on demande à Douce Mère.

Tes ordres. Mère merveilleuse!

 

Que faire ? C'est un bon ouvrier et régulier, n'est-ce pas ? J'espère que ce nouveau mariage ne le rendra pas irrégulier.

Faut-il lui donner cet argent? Si vous pensez que c'est nécessaire, je ne dirai pas non.

Le 6 juillet 1933

 

Douce Mère,

Le ruban double décamètre : le simple bon sens me prouve que le ruban ne s'impose pas. Mais quelque part dans mon être il y a un mécontente- ment. Je ne peux pas "fixer" cet endroit récalcitrant. C'est mon mental? N'est-ce pas le mental qui prouve l'absurdité de cette demande ?

 

C'est une formation mentale, faite à l'instigation d'un désir du vital, qui proteste et se révolte parce qu'elle ne peut pas se réaliser. Ces formations sont des entités autonomes. C'est pourquoi, une fois faites, elles échappent presque entièrement à la volonté consciente à moins qu'on ne fasse une contre-formation qui la détruise. Quelque chose comme ceci, par exemple : je ne veux pas recevoir de double décamètre. Je souhaite vivement que Mère ne me fera pas l'affront de m'en donner un, car cela me couvrirait de honte et de confusion. De pareils désirs ignorants et obstinés sont indignes d'un enfant de la Mère.

Le 12 septembre 1933

 

Douce Mère,

Le forgeron : paille de fer dans l'œil. Y a-t-il un rapport quelconque entre le/ait que je lui ai donné ce travail 

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—barres pour le métier à broder de X—sans t'en avoir parlé d'abord, et l'accident qui est sur- venu ? Quand le forgeron m'a vu après l'accident, je me suis demandé s'il y avait un rapport quelconque, et aussitôt que tu as dit que tu avais eu des doutes sur ce genre de long métier, mon malaise a redoublé. Donne-moi la lumière, Douce Mère.

 

Ce sont des mouvements qui commencent dans le désir et l'ignorance (le désir de X pour ce métier sans avoir la connaissance de détail de comment le métier devait être fait) et qui se déroulent sans harmonie, dans le désordre et la confusion, entraînant des conséquences parfois tout à fait fâcheuses comme cette fois-ci. Je m'explique : l'idée d'un grand métier est excellente mais d'une exécution difficile. Si le désir n'avait pas été là, voulant une réalisation immédiate, le projet aurait pu être étudié soigneusement avant l'exécution et celle-ci aurait été plus harmonieuse.

Le 13 septembre 1933

 

(Au sujet de la construction d'un support pour un tamis mobile à la graineterie.)

 

Savez-vous ce que c'est qu'une balançoire?

C'était un jeu que j'aimais beaucoup quand j'étais petite. C'est construit en bois, et la planchette sur laquelle on se balance est suspendue par de fortes cordes à des anneaux fixés sur la barre du haut. Les pieds sont solidement enfoncés dans le sol- Je pensais que quelque chose de similaire pourrait être fait pour le tamis.

Le 19 septembre 1933

 

Ô Mère divine,

J'ai commencé à examiner les détails des travaux avec un œil critique, et je suis comblé de preuves que vraiment je ne sais rien, je ne puis rien, je ne suis bon à rien. Avec ces constatations, j'ai perdu la joie dans l'action.  

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Il n'y a qu'à se réjouir d'être devenu conscient d'un manque de précision (thoroughness) puisque cela permet de faire un progrès; en vérité, faire un progrès, surmonter une difficulté, apprendre quelque chose, voir clair dans une inconscience, voilà les choses qui rendent vraiment heureux.

Le 22 septembre 1933

 

Douce Mère,

Comment est-ce que les gens peuvent m'insulter si facilement, je me le demande. Est-ce que ma physionomie manque de vigueur? Est-ce que j'ai du dédain pour les autres et est-ce pour cela que les autres me traitent dédaigneusement? Je tâtonne, mais je ne trouve pas d'explication satisfaisante.

 

Il se peut que l'apparence physique ait quelque chose à faire là-dedans, mais a vrai dire, ce n'est que peu de chose. Je .crois plutôt à l'influence des atmosphères. Chacun a autour de lui une atmosphère faite de vibrations résultant de son caractère, son état d'âme, sa manière de penser, de sentir, d'agir... Ces atmosphères agissent et réagissent les unes sur les autres par contagion ; les vibrations sont contagieuses, c'est-à-dire qu'on attrape facilement la vibration de celui que l'on rencontre, surtout si cette vibration est un peu forte; ainsi il est facile de comprendre que celui qui porte en lui- même et autour de lui la paix et la bienveillance, imposera en quelque sorte aux autres quelque chose au moins de sa paix et de sa bienveillance, tandis que le mépris, l'irritabilité, l'emportement éveilleront chez les autres des mouvements similaires. Dans cette ligne se trouve l'explication de bien des circonstances, quoique ce ne soit pas, évidemment, la seule explication !

Le 30 octobre 1933

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Douce Mère,

Ce matin pendant le Pranâm une prière s'est élancée vers toi, de mon cœur : "Que ce jour m'apporte l'occasion de garder la paix même contre provocation. " C'était une prière très spontanée.

 

Voilà une prière bien imprudente! C'est comme si vous attiriez volontairement sur vous-même la circonstance désagréable.

 

(Le sâdhak raconte ensuite comment il s'est emporté au cours d'une discussion.) Je regrette de m'être emporté en prononçant ces dernières phrases. J'ai remarqué que même quand je suis conscient, si j'ouvre la bouche. Je perds la maîtrise de moi-même. Je m'emporte peu a peu, de phrase en phrase.

 

La conclusion vient donc d'elle-même : il vaut mieux ne pas ouvrir la bouche. Dans certains cas, comme celui-ci, il est plus sage de tourner le dos que d'ouvrir la bouche.

Le 3 novembre 1933

 

Douce Mère,

Au sujet de l'armoire-cloison dans la pièce de Y: J'ai fait les étagères de cette armoire avec des petits morceaux de bois. Une grande quantité des planches ramassées a ainsi été utilisée. Mais Y a exprimé son mécontentement en voyant ces étagères.

 

Oui, ici tout le monde ne pense qu'à dépenser, dépenser, dépenser autant qu'on peut, personne ne songe à faire des économies et à éviter le gaspillage. C'est le triomphe de l'égoïsme. Vous pouvez leur montrer cela et ajouter que c'est moi qui ai donné l'ordre d'utiliser tous les vieux morceaux de bois autant que possible.

Le 13 novembre 1933

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